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Projet de loi C-13: Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada – amendement

June 15, 2023

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer l’amendement du sénateur Loffreda. Je vous remercie de l’avoir présenté, monsieur le sénateur.

Chers collègues, les mots que nous utilisons ont une réelle importance. Par conséquent, nous devons faire particulièrement attention aux mots que nous intégrons dans nos mesures législatives. On ne peut pas prédire quelles pourraient être les conséquences imprévues de ces trois références à la Charte de la langue française, mais on peut prédire avec plus de certitude qu’il n’y aura aucun préjudice à les supprimer. Après tout, le projet de loi C-13 ne fait aucune mention de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick ni à aucune des autres lois provinciales ou territoriales. Je soutiens que les mentions de la Charte de la langue française sont superflues et potentiellement nuisibles. Par conséquent, chers collègues, elles devraient être éliminées.

 

La semaine dernière, j’ai écouté l’entrevue d’Ezra Klein, du New York Times, avec Jennifer Pahlka au sujet de l’appareil gouvernemental. En 2013, Mme Pahlka était cheffe adjointe de la technologie dans l’administration du président Obama. En 2020, elle a aidé l’administration de Gavin Newsom, gouverneur de la Californie, à corriger son programme d’assurance-chômage. Comme le dit M. Klein, Mme Pahlka a des opinions très crédibles sur « pourquoi les choses vont mal [au sein du gouvernement], même quand les gens tentent de bien faire les choses ». Elle s’intéresse particulièrement à un aspect des politiques que les décideurs oublient trop souvent : la mise en œuvre. Ses réflexions peuvent être pertinentes pour les législateurs de n’importe quel pays, y compris le nôtre.

Dans l’entrevue, Mme Pahlka raconte comment un dispositif technologique mentionné dans une loi fédérale seulement à titre d’exemple est devenu une exigence à cause de l’interprétation par la hiérarchie des ministères gouvernementaux au cours des années depuis l’adoption de la loi. C’est parce qu’au sein des bureaucraties, les fonctionnaires sont le plus souvent tenus responsables selon qu’ils ont suivi ou non un processus, et les processus sont fondés sur les termes précis de la loi.

Les expériences de collaboration de Mme Pahlka avec les gouvernements américains aux niveaux des municipalités et des États et au niveau fédéral montrent que les mots employés dans une loi sont très importants et ont des conséquences. En tant que législateurs, nous devons examiner le projet de loi avec soin pour déterminer si son libellé pourrait avoir des conséquences imprévues.

La semaine dernière, Eva Ludvig, présidente du Quebec Community Groups Network, a fait part de ses préoccupations sur la façon dont le projet de loi C-13 pourrait être interprété par les fonctionnaires. Elle a dit ceci :

Une fois les dispositions législatives adoptées, on ne sait pas comment elles seront interprétées, non seulement par les tribunaux, mais aussi par les fonctionnaires qui doivent les appliquer.

Cependant, lorsque nous l’avons questionnée sur le libellé du projet de loi C-13, la ministre Petitpas Taylor n’était pas d’accord. Elle a dit ceci :

Oui, notre projet de loi mentionne la Charte de la langue française, mais ce n’est qu’à titre indicatif, pour dire que ce régime s’applique au Québec.

Elle nous a dit que les avocats du ministère de la Justice lui ont donné l’assurance que les risques liés à cette mention de la Charte sont minimes. Ils sont peut-être minimes, mais il y a quand même des risques, honorables collègues. Le comité a aussi entendu des avocats qui ne sont pas employés par le gouvernement et qui ont dit que ces mentions présentent des risques considérables.

Honorables sénateurs, au début de son entrevue avec Jennifer Pahlka, Ezra Klein a dit ceci :

Dans les médias […] La politique, les élections, les grandes questions, les combats et les théories sont au centre de toutes les attentions. Mais ensuite, le projet de loi est adopté et les détails de la mise en œuvre de cette politique dans la vie des gens sont laissés à l’appréciation de quelqu’un quelque part. Et lorsqu’elle […] rend la vie des gens plus difficile en raison de sa mise en œuvre, il n’y a souvent pas de tollé parce qu’il n’y a pas d’attention, et il n’y a donc pas de solution.

Chers collègues, l’amendement du sénateur Loffreda nous offre la possibilité de réduire le risque que pose la version actuelle du projet de loi, alors que les projecteurs sont encore braqués sur lui, afin d’éviter certaines des conséquences involontaires que le projet de loi pourrait avoir sur la vie des gens. Je vous invite à vous joindre à moi pour appuyer cet amendement.